Plâtres
Cette suite d’une centaine de pièces qui, à l’heure actuelle s’allonge régulièrement en nombre, est à l’origine de la gravure et de l’estampage sur de l’argile fraîche. Elle permet d’imprimer des croquis directement sur une matière tendre et déformable à l’envie. Cela permet aussi des coupes ou des ajustements bord à bord comme si il s’agissait de papier.
Une empreinte est ensuite réalisée avec du plâtre coloré dans sa masse.
LORSQUE LE GYPSE COURONNE SES PLATRES
Est-ce l’attrait de ce modeste matériau, qui pris en vrac à la sortie du sac, désarçonne autant le simple maçon que le Maître Fresquiste ? Ou bien encore, est-ce la multiplicité de ses atours, de poudreuses avalanches aux tourbillons liquides, le plasticien dès lors succombe à cette troublante matière ? N’ayant en tout et pour tout dans la coulée du moulage, cinq petites minutes de séchage, le Maître-Plâtrier doit travailler sur le vif et cela sans la moindre hésitation !
Si, de surcroît, ainsi que Jean Grisot manipule le gypse. Il teinte de pigments, fragmente dans la masse. Ne forge-t-il pas en quelque sorte, à froid, ses empreintes ? Quelles quelles soient : patinées, incisées, plaquées, dénivellées, ajourées, enduites, traces végétale, parées d’apports insolites, elles deviennent sans exception, un tremplin argileux, saillies sur lequel un socle négatif happe au passage la surface positive, leste ses digues…
Un méandre génétique appuie au départ, les déploiements pluridisciplinaires qui suivront Jean Grisot.
Ses parents artistes : un père peintre, une mère musicienne lui insuffle une appartenance à un monde feutré, douillet qu’est un abri culturel. Les collines du Doubs danses autour de son berceau, tandis que l’horloge égrène les années quarante dans la pénombre de la maison bourgeoise encerclée de fenêtres aux ferronneries Franc-Comtoises.
LES VISIERES DU SILENCE
Naissent d’étroits liens arrimés aux carrures de la terre. Ils assouvissent une interrogative acuité. Par eux, consolident son éveil à perpétuité.
Que ces traditions viennent des patrons de l’Ecole des Beaux Arts de Paris ou ceux des Arts Décoratifs de Nice, Jean Grisot démasque vite le carcan de chaque atelier. Défiant toute contrainte, ce rôdeur solitaire enclenche une série d’évasions par sa vie et son œuvre. Surgissent alors, les surprenantes enclaves des « paysages de sols » des années 1975-1990. Ces palpitantes cabrioles lui permettent d’ouvrir l’œil.
Il va de l’une à l’autre avec l’aisance du voltigeur. Avec la même souplesse, lorsque vous le rencontrez par hasard, sur les chemins de traverses, en vélo. Il arpente les mamelons minéraux de l’arrière-pays Provençal. Quittant momentanément l’espace de l’atelier Jean Grisot bat la campagne. Essuie les montées et descentes à l’affût.
N’est’ il pas sont chantre visuel ? Au retour, il s’abat repu d’air, essoufflé sur le vieux fauteuil en cuir aux flancs troués de l’atelier. Lève la tête pour déceler les toiles arachnéennes du Velux ouvert au ciel. Grandiose chef d’œuvre en précision à la merci des courants d’air. Puis, laissant le regard faire l’inventaire, il contourne chevalets, cartons à dessins.
Les géants bigoudis de papier scellés aux murs. Les flaques de plâtre qui éclaboussent des dépouillements décoratifs.
Flore Dufour, Fondation Tyrose Guthrie (Irland) 14/10/1997